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5 mai 2011 4 05 /05 /mai /2011 17:35

LEON & VICTOR

Un débat judiciaire bien feutré anime le monde des avocats et celui des conseillers en réduction des coûts. A la clé, la très sérieuse question de savoir si ces derniers, dans le cadre de leur mission, délivrent ou non des consultations juridiques.

A quelques mois d’intervalle, la première chambre civile de la Cour de Cassation et le Tribunal de Commerce de Bobigny s’opposent sur le sujet et sur l’interprétation de la loi du 31 décembre 1971 et nous jouent, pour la nième fois, la farce du principal et de l’accessoire en matière de droit social et de législation fiscale.

La Cour de Cassation, en novembre 2010, avait semblé vouloir défendre le pré carré des avocats, le Tribunal de Bobigny les a fait déchanter en janvier 2011.

Au-delà du débat purement juridique, de la différence entre consultation juridique et prestation à caractère juridique, du niveau de complexité du problème juridique posé, les uns, les avocats, défendent leur assiette et demandent que l’on respecte leurs compétences. Quant aux autres, cela fait bien longtemps qu’ils ne respectent plus grand-chose.

Comment travaillent les réducteurs externes de coûts ? Ils se vendent en ne se rémunérant que sur les économies qu’ils font réaliser à leurs clients. Sur le papier, tout le monde s’apprête à être content et à se féliciter de vivre dans un monde décidément bien fait.

Dans les faits, vous venez de lâcher un fauve qui ne pourra se nourrir qu’en débusquant ses proies, choisies prioritairement hors la sphère sociale ou fiscale. Sérieusement, allons-nous trouver matière à économies de cotisations et d’impositions diverses dans une société dotée de tous les services compétents et payés pour cela toute l’année à temps plein ?

En réalité, les économies seront réalisées auprès des fournisseurs habituels de l’entreprise et c’est à ce niveau que le malaise se crée.

Le conseil en réduction de coûts va d’abord tenter d’élargir ses missions d’origine. Et de se rendre indispensable. Puis, carte blanche en mains, il interviendra au nom de son mandant, en vertu d’un mandat tacite la plupart du temps, pour prendre un contact direct avec les fournisseurs et entamer les négociations. Un, on glane les informations confidentielles. Deux, on capte les méthodes, les process que l’on utilise par la suite en vue d’un benchmark improbable entre des fournisseurs abusés, chacun ayant été personnellement et préalablement assuré faire partie des partenaires retenus par l’entreprise au terme d’un référencement sauvage qui, jamais, ne dit son nom. Trois, on nettoie.

Le souci légitime de maîtriser les coûts de l’entreprise est aujourd’hui dévoyé et suscite des vocations de fossoyeurs. Aux chasseurs de coûts s’adjoignent désormais les détecteurs de devis truqués, eux-mêmes forts d’une expérience trentenaire dans la plomberie financière grand angle. On le sait, rien de tel qu’un ancien hacker pour chasser la piraterie sur Internet, rien ne vaut un repenti pour coincer les mafieux actifs. Vieux comme le monde. Il se pose là un problème d’éthique en même temps que s’imposent  peu à peu des pratiques économiquement délétères. Aller systématiquement au moins-offrant , pudiquement rebaptisé « mieux-disant », créer ce moins-offrant, le fabriquer de toutes pièces au prix de son désarroi parce que de son existence dépend la rémunération du chasseur de coûts aboutira dans quelques années à des catastrophes commerciales. La qualité des prestations et des produits ne pourra pas suivre et ça, on le sait déjà.

Au-delà, c’est le panel de fournisseurs du donneur d’ordres qui sera saccagé. Perdre des sous-traitants, provoquer des renoncements, détériorer les bilans pour en faire, par la suite, un motif fallacieux de déréférencement ne servira que les intérêts à court terme du cost-killer, très fier de lui et de sa réputation de requin blanc. A moins que.

A moins que les conseils en réduction des coûts ne suivent la même carrière récente que les agences de notation financière dont la crédibilité vient de prendre un souffle. Alors, les chasseurs de coûts donnent-ils, oui ou non, des consultations à caractère juridique ?

Franchement, comme vous, on s’en fiche.

 

DT

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